DHQ: une base de données sur les homicides commis au Québec

 

Présentation


Le Dictionnaire des homicides commis au Québec (ci-après DHQ) s’intéresse à toutes les causes d’homicides, c’est-à-dire lorsque les autorités sont en présence d’un décès causé par une tiers personne. Cela inclut les homicides involontaires, prémédités (meurtres), ainsi que les causes qui se sont terminées par un verdict officiel de culpabilité ou d’acquittement. Enfin, il englobe les homicides pour lesquels les tribunaux n’ont jamais déposé d’accusation, que l’on désigne plus couramment dans la population comme les affaires non résolues.

Le DHQ était d’abord destiné à devenir une publication papier et se voulait également un ouvrage complémentaire à un autre projet de recherche qui avait pour ambition de présenter une classification détaillée des homicides commis au Québec. Dans le seul but de mieux comprendre ce phénomène de la criminologie, et peut-être même pour tenter d'en diminuer les effets futurs sur notre société, nous présenterons les nombreuses rubriques qui composent ce dictionnaire à partir de janvier 2021.

Contrairement aux condamnés à mort du Canada pour la période de 1867 à 1976, il n’existe aucune base de données pouvant permettre d’assurer au lectorat la présentation d’une exhaustivité sans faille de tous les homicides commis en territoire québécois depuis l’arrivée de Samuel de Champlain. Le DHQ est donc, par définition, incomplet. Certaines études ont affirmé avoir recensé la totalité des homicides pour des périodes limités, par exemple entre 1954 et 1989. Toutefois, elles admettent se baser sur des sources comme Statistiques Canada et Allô Police. Or, Statistiques Canada a commencé à publier de telles données à partir de 1976, tandis qu’Allô Police fut un hebdomadaire à sensation qui a débuté ses activités en 1953.[1] De plus, ces études ne présentent pas les circonstances des crimes qu’elles examinent. On prive ainsi le lecteur et le chercheur[2] d’une foule de détails qui, pourtant, sont primordiaux pour espérer atteindre une meilleure compréhension des motivations criminelles en matière d’homicides.[3]

À la lecture de la troisième édition du Crime Classification Manual (ci-après CCM-3), dont l’un des auteurs est John E. Douglas, le célèbre profileur du FBI à l’origine du département des sciences du comportement et dont la carrière a inspiré la série télévisuelle Mindhunter, on comprend à quel point il reste beaucoup de travail à faire dans l’indexation de nos dossiers judiciaires. Cela commence par une volonté de se doter d’outils convenables.

Conscients qu’il est utopique de pouvoir répertorier tous les homicides commis en sol québécois depuis la Nouvelle-France, les auteurs du DHQ souhaitent présenter un échantillonnage satisfaisant qui permettra de dresser un portrait de la réalité des différentes catégories de motivations homicidaires. Plus nous parviendrons à recenser de cas – surtout en les résumant de manière convenable – et plus nous pourrons atteindre une meilleure compréhension.

La consultation de tous les dossiers judiciaires[4] des milliers de cas répertoriés par le DHQ était humainement impossible. Une telle recherche représenterait non seulement des heures incalculables de travail, mais plusieurs dossiers n’ont pas été conservés avant d’être versés à Bibliothèque et Archives nationales du Québec (ci-après BAnQ). Toutefois, lorsque l’exercice était possible, c’est à eux que nous avons accordé la priorité en matière de source d’information.[5]

Les rubriques sont classées par date, suivie du nom de la ou des victimes.

La seconde ligne indique le type d’homicide (selon la grille de classification). Lorsque les détails étaient insuffisants pour s’assurer de la catégorie, la désignation utilisée se contente de présenter le titre de l’une des quatre grandes catégories, ou alors on s’est abstenu de toute mention. Cette ligne s’accompagne de certains détails concernant la façon dont l’homicide a été commis. Par exemple, on peut y retrouver le type d’arme utilisé (arme à feu, arme blanche, etc.), la cause du décès (strangulation) et finalement certains détails pouvant être utiles à la compréhension de la motivation du tueur, comme par exemple s’il y a eu une mise en scène ou présence de surpuissance.

La troisième ligne se consacre au lieu géographique où le crime a été commis, tandis que la quatrième souligne le lien qu’il pourrait y avoir entre la victime et l’agresseur (ex. : lien de parenté, lien de parenté par alliance, lien de voisinage, lien d’affaires, ou aucun lien connu).

Finalement, la cinquième et dernière ligne se consacre à l’état actuel du dossier. Voici un exemple d’en-tête de rubrique :

Date du crime – Nom de la victime, âge de la victime

Catégorie de motivation – type d’arme – autres détails

Lieu (ville ou région du Québec)

Lien entre la victime et le ou les agresseurs (ex. : lien de parenté, lien d’amitié, lien d’affaires, aucun lien connu)

État du dossier (nom de la personne accusée, condamnée, acquittée, etc.)

Pour qu’une personne soit publiquement suspectée d’un homicide, une mise en accusation officielle doit avoir été déposée devant la justice. Par ailleurs, les personnes suspectées par une enquête policière ne peuvent être considérées comme des suspects sérieux, et encore moins s’ils sont montrés du doigt par les ragots. C’est pourquoi le DHQ utilise la mention « aucune accusation connue » pour désigner les cas qui n’ont connu aucun développement ou qui sont demeuré au niveau des enquêtes policières. Il est à noter que les informations contenues dans les dossiers d’enquêtes policières font l’objet d’une restriction de consultation pour une période de 100 ans.

Politique de sélection

La sélection des dossiers repose essentiellement sur deux règles. La première consiste à accepter tous les types d’homicides selon la définition présentée plus bas. La deuxième restreint les cas de manière géographique afin de pouvoir se concentrer sur les homicides commis à l’intérieur de la frontière québécoise.

Selon le Code criminel canadien, un homicide est ainsi défini : « Commet un homicide quiconque, directement ou indirectement, par quelque moyen, cause la mort d’un être humain. »[6] Cette définition, très large, englobe les homicides accidentels, que le Code exclut du monde pénal par le terme « homicide non coupable ». C’est le seul type d’homicide que le DHQ a exclus de ses recherches. Autrement, le lecteur et le chercheur s’y perdraient dans un nombre impressionnant de victimes de la route ou autres formes d’accidents. Comme ce type d’homicide est rarement intentionnel, il ne pourrait non plus nous renseigner convenablement sur les motivations criminelles des tueurs. Or, comme il en sera question dans le plan de classification, nous croyons pertinent de nous intéresser uniquement aux homicides qui comportent un minimum d’intention criminelle (mens rea).

Dans les cas de la négligence criminelle, on se retrouve devant une personne qui n’avait peut-être aucune intention criminelle consciente au départ mais dont le jugement ou la négligence ont fini par causer la mort d’une ou plusieurs personnes. La tragédie qui s’est produite à la fin de décembre 1979 dans la petite localité de Chapais est un parfait exemple de cette catégorie. Lors d’une fête de Noël, un jeune homme a utilisé un briquet pour mettre le feu à des décorations installées dans la salle où une fête avait été organisée. L’incendie qu’il a ainsi créé a causé la mort de 48 personnes. L’intention criminelle n’a pas été prouvée. Toutefois, son manque de jugement a causé la mort de plusieurs personnes. Sans ce geste, le drame ne se serait jamais produit. Le DHQ considère que les décès qui surviennent suite à une négligence criminelle proviennent d’un manque de discernement et que, par ailleurs, cela est le résultat du comportement de la personne qui commet l’acte. Ainsi, nous pensons qu’il s’agit d’une certaine forme de motivation criminelle.

Quant aux autres types d’homicides, le Code criminel les désigne comme ceci : « L’homicide coupable est le meurtre, l’homicide involontaire coupable et l’infanticide. » Nous verrons cependant que le plan de classification comporte quatre grandes catégories, en plus de plusieurs divisions et sous-divisions.

Devant le mot « meurtre », nous retenons la définition générale du Code, c’est-à-dire qu’il laisse entendre un acte prémédité. Pour cette raison, le meurtre est considéré comme l’acte criminel le plus grave qui puisse être commis au Canada. Cette préméditation laisse sous-entendre que le tueur a longuement réfléchi à son crime avant de le commettre, et par conséquent qu’il peut prendre un certain plaisir à passer à l’acte. Le taux de récidive est donc plus élevé pour ce type de personnalité.

Le DHQ exclut automatiquement les causes de disparitions. En effet, celles-ci n’ont pas de dénouement connu. Puisque la cause du décès reste un mystère – en admettant que la personne disparue soit décédée – on pourrait se retrouver devant un cas de suicide, d’enlèvement ou de disparition volontaire. La rigueur que le Dictionnaire souhaite se donner ne pourrait donc pas se fier sur ces causes tout en conservant l’espoir de bien classifier ou mieux comprendre le comportement des tueurs, de même que les circonstances dans lesquelles ils commettent leurs crimes.

Les cas où l’homicide n’a pas été prouvé hors de tout doute ont également été exclus. À titre d’exemple, voyons le cas suivant.

Le 23 mai 1979, le corps de Maria Dolores Bravo, 17 ans, était retrouvé dans le stationnement de l’entreprise Lansing Bagnall, sur le chemin de la Côte-de-Liesse, à Dorval. La Presse a souligné que l’adolescente était connue dans le milieu des discothèques sous le surnom de Lolita. Selon l’enquête du coroner, Maria serait décédée d’une surdose de drogue en raison de la présence de marques de piqûres sur son corps. Malgré le fait qu’elle était nue et enfermée dans un coffre au moment de sa découverte, le coroner se devait de conclure uniquement d’après les éléments dont il disposait. Ainsi, il ne pouvait confirmer que Maria avait été victime d’un meurtre puisqu’aucun élément ne le laissait croire. Par exemple, une ou plusieurs personnes ont pu disposer de son corps dans un coffre sans pour autant être responsables de son décès.

Louis « Melou » Roy, un Hells Angels, est disparu en juin 2000 pour ne plus jamais être revu par la suite. Même s’il est présumémment mort, le DHQ ne lui réserve aucune rubrique puisque son homicide n’est pas officiel. Cette situation s’applique aussi à d’autres motards criminels et membres du crime organisé qui ont probablement été assassinés mais dont nous ne possédons aucune preuve. Ces assassinats clandestins, qui n’ont laissé aucune trace dans les documents officiels, ne sont donc pas comptabilisés dans les rubriques du DHQ.

Il en va de même pour les causes de disparition et les dossiers qui peuvent présenter une controverse invitant la population à croire qu’il y a eu meurtre.[7] La seule exception à cette règle semble être celle d’Alain Perreault (voir 2003, 17 juillet), que la justice a condamné en l’absence du corps de sa victime, Lyne Massicotte. Ce type de condamnation est plutôt rare.

Les homicides survenus lors d’interventions policières ont aussi été exclus. Dans la majorité de ces cas, l’intention criminelle n’était pas présente. Les policiers réagissent dans un cadre de travail spécifique, commettant ainsi des homicides qui, cependant, pourraient se classer dans la sous-classe des homicides situationnels.

Le DHQ compte un homicide par victime. Par exemple, dans le cas d’un père de famille qui assassine sa femme et son enfant avant de s’enlever la vie, on calcule qu’il en résulte deux homicides : celui de la mère et de l’enfant. Le suicide de l’agresseur n’est pas considéré comme un homicide. Par conséquent, il ou elle n’est pas une victime au sens de la définition du DHQ.

Quant au statut des dossiers en ce qui a trait à la résolution de crime, le DHQ s’en remet à la terminologie officielle. Par exemple, pour qu’une affaire soit résolue un verdict légal obtenu devant un tribunal criminel est nécessaire. Par conséquent, une affaire d’homicide non résolue se présente par une absence d’accusation, de condamnation ou par un verdict d’acquittement. De telles conclusions ne changent toutefois rien au fait que la cause demeure une affaire d’homicide.

Sources

Dans le milieu du fait divers, la prudence est de mise en matière de la qualité des sources. Si la parfaite objectivité médiatique est un concept plutôt utopique, certains journaux, au fil du temps, ont écopé d’une réputation douteuse, nous avons donc priorisé, dans la mesure du possible, un minimum de deux sources journalistiques par rubrique. On note aussi qu’à partir du tournant des années 2000, les sources Internet deviennent plus accessibles et, par conséquent, il nous a été plus aisé de référer à plusieurs d’entre elles pour résumer un seul dossier. Les références à celles-ci apparaissent en notes de bas de page.

Les enquêtes de coroner sont également au cœur de la reconstitution des faits entourant un décès violent. Avant 1986, les enquêtes de coroner sont disponibles dans les locaux de BAnQ, ce qui implique un déplacement physique ou certains coûts afin de couvrir les frais de numérisation. De plus, certaines périodes sont absentes. On pense qu’elles ont été détruites avant leur versement à BAnQ.

Après la nouvelle loi des coroners (3 mars 1986), il est plus facile d’obtenir les rapports d’investigation, simplement en transmettant une demande par courriel au Bureau du Coroner du Québec. La plupart des dossiers sont transmis en quelques jours, parfois même le lendemain. Toutefois, ces rapports d’investigation sont plus succincts, ce qui s’explique en grande partie par le fait que les coroners n’ont plus la responsabilité de reconnaître une personne criminellement responsable. Cette loi a principalement été changée afin de protéger la vie privée. Avant 1986, les enquêtes publiques permettaient aux journalistes de retransmettre un contenu parfois pervers par la voie des médias.

Les sources d’information varient selon les époques. Le site de La Mémoire du Québec présente une liste dénombrant plusieurs homicides commis depuis la période de la Nouvelle-France jusqu’en 1979. Bien qu’incomplet, cet outil a permis d’accélérer la recherche et de détailler ces dossiers par des sources journalistiques.

Les journaux, dont les principaux sont disponibles en ligne via le site de BAnQ Numérique[8], a représenté une source importante et surtout incontournable. La principale difficulté était de s’orienter vers les bons titres selon les époques. Quoique leur existence est aujourd’hui menacée par une présence dominante de la documentation numérique – les médias sociaux et autres plateformes – les journaux traditionnels ont longtemps représentés une source d’information primordial, voir unique pour certaines classes de la société. Plusieurs d’entre eux n’existent plus. D’autres ont une réputation peu enviable. Gardons cependant à l’esprit que ce type de source peut parfois s’avérer d’une fiabilité aléatoire. Il est donc nécessaire de faire preuve de discernement.

Ce ne sont évidemment pas tous les homicides commis au Québec qui ont fait l’objet d’une monographie, quoique plusieurs se sont avérés d’une grande utilité. Par exemple, on pense aux écrits de Pierre De Champlain, qui évoque dans ses livres plusieurs meurtres reliés au crime organisé du 20e siècle; les confidences de la mère de Marc Lépine dans Vivre (2008); et plusieurs autres monographies.

Finalement, soulignons que le dossier judiciaire a été étudié ou partiellement étudié pour certains cas. Si le dossier judiciaire demeure la source d’information la plus complète, il souffre également de cette caractéristique : il est souvent volumineux. Il est donc nécessaire d’investir beaucoup de temps et d’énergie pour en analyser le contenu.

Couverture historique

Si le DHQ s’est imposé une limite géographique, il en va autrement pour la période couverte. Ainsi, il reste ouvert à tous les homicides commis depuis l’époque de la Nouvelle-France jusqu’à aujourd’hui. Ce choix impose certaines difficultés puisque les bases de données et autres sources varient énormément selon les époques. Par exemple, si les journaux peuvent être très utiles pour certaines périodes, ils perdent leur priorité pour certaines autres. La façon de rapporter les faits dans les médias a également connu une importante évolution.

Les monographies, comme on s’en doute, présentent d’énormes lacunes puisque celles-ci se sont principalement intéressées aux affaires judiciaires les plus populaires, ce qui représente une infime partie du nombre de dossiers. Par conséquent, les homicides méconnus, qui sont en plus grand nombre, n’ont suscité aucune attention de la part des auteurs, des historiens ou des chercheurs.

La situation idéale nous amènerait dans les divers centres d’archives des districts judiciaires du Québec afin de consulter les plumitifs pour en extraire toutes les causes d’homicides survenues entre 1608 et aujourd’hui. Voilà une utopie ou un travail qui reste à faire. Tout dépend de notre niveau d’optimisme face à la situation.

Classification des homicides

Les auteurs sont plutôt divisés sur la façon de classifier les homicides. Certains évoluent en fonction de la nature du crime, d’autre avec la relation qui lie l’agresseur à sa victime, ou encore par le mobile du crime. Une autre étude a choisi la méthode qui s’apparente à celle utilisée par les médias, c’est-à-dire celle dite « intuitive ». Selon celle-ci, on ferait face aux six catégories suivantes : les homicides familiaux et passionnels, les homicides querelleurs et vindicatifs, les règlements de compte, les homicides associés à un autre délit, les homicides « autres », et finalement les homicides indéterminés.[9]

Or, plusieurs de ces catégories devraient être considérées comme des sous-classes, sans compter que cette définition paraît insuffisante, surtout si on souhaite atteindre une meilleure précision. C’est pourquoi la classification du CCM-3 apparaît plus appropriée. Le DHQ s’inspire donc largement de celui-ci, et cela dans le but de présenter une tentative de classification essentiellement basée sur les motivations des tueurs québécois. Ainsi, le lecteur se retrouve devant quatre grandes catégories, qui à leur tour se voient divisées en sous-classes. Ces dernières permettent de préciser davantage certaines motivations. Ces quatre grandes catégories sont : l’homicide à entreprise criminelle, l’homicide à motivation personnelle, l’homicide sexuel, et enfin l’homicide motivé par un groupe. Peu importe l’arme utilisée ou le type d’incident – par exemple un double meurtre, une tuerie de masse, etc. – la priorité est ici accordée à la motivation première du criminel. À titre d’exemple, deux tueurs de masse dont les crimes présentent d’importantes similitudes, peuvent avoir agi sous des motivations différentes.

Le CCM-3 accorde beaucoup d’importance à la victimologie. Là aussi, nous nous retrouvons devant des informations limitées. Ces éléments font plutôt partie des enquêtes policières et doivent, dans notre contexte social, demeurer confidentiels. Nous respectons parfaitement ce fait, mais cette situation nous empêche évidemment de dépeindre le contexte du crime dans ses moindres détails. Les habitudes ou le mode de vie d’une victime peuvent apporter des indices cruciaux sur une piste à suivre. Heureusement, pour plusieurs autres cas, il est tout de même possible de colliger suffisamment d’informations fiables pour pouvoir prétendre à une classification honnête.

Le 22 octobre 2019, suite à une séparation douloureuse, Jonathan Pomares a tué ses deux enfants, Hugo, 7 ans, et Élise, 5 ans, avant de s’enlever la vie. Si on en croit un débat suscité par ce crime, il est important de s’attarder également à la terminologie. Certes, le présent ouvrage souhaite garder son objectivité face aux émotions que peuvent susciter certains crimes mis de l’avant par les médias, mais il est également conscient de faire la différence entre les termes utilisés. Le plan de classification suivant en tiendra compte en revoyant la signification de certains mots, en procédant à des ajouts ou des soustractions.[10]

Puisque le DHQ couvre une longue période sur l’échelle du temps, certaines catégories comportent des descriptions qui sont plus adaptés pour des homicides commis dans le passé, ou vice versa. On aura compris, par exemple, que le tueur de masse est un terme relativement moderne qui n’existait pas en Nouvelle-France.


Grille sommaire de classification

  • Les homicides motivés par une entreprise criminelle
    • Meurtre par contrat
    • Meurtre motivé par le gangstérisme
    • Meurtre par compétition criminelle
    • Meurtre par kidnapping
    • Meurtre par altération de produits
    • Meurtre en lien avec la drogue
    • Homicide motivé par des gains relatifs aux assurances ou aux héritages
    • Profit personnel
    • Profit commercial
    • Homicide commis lors d’un vol (felony murder)
      • Homicide sans discernement commis
      • Homicide situationnel
      • Homicide situationnel envers une victime âgée
    • Les homicides à motivation personnelle
      • Érotomanie
      • Les homicides domestiques
        • Homicide par un conjoint
          • Homicide par un conjoint suicidaire
          • Homicide par un conjoint non suicidaire
        • Homicide par une conjointe
        • Matricide
        • Parricide
        • Fatricicide
        • Néonaticide
        • Filicide
          • Filicide commis par un père maltraitant
          • Filicide commis par une mère maltraitante
          • Filicide commis par un père non maltraitant
          • Filicide commis par une mère non maltraitante
        • Les homicides argumentatifs et conflictuels
          • Homicide argumentatif ou par rixe
          • Homicide conflictuel
        • Infanticide
        • Meurtre d’autorité
        • Meurtre par vengeance
        • Homicide à motif non spécifique ou indéterminé
        • Homicide extrémiste individuel à motivation socio-politique
        • Homicide extrémiste individuel à motivation religieuse
        • Terrorisme individuel d’inspiration politique
        • Terrorisme individuel d’inspiration socio-économique
        • Homicide médical
          • Pseudo altruisme
          • Pseudo héroïque
        • Homicide par négligence criminelle
        • Homicide situationnel
      • Homicides sexuels
        • Homicide sexuel organisé
        • Homicide sexuel désorganisé
        • Homicide sexuel mixte
        • Homicide sexuel sadique
        • Homicide sexuel envers une personne âgée
      • Les Homicides cautionnés par un groupe
        • Homicide à motivation cultuel
        • Homicide extrémiste
        • Homicide extrémiste politique
        • Homicide extrémiste religieux
        • Homicide par excitation

 


[1] Il semble étonnant que des chercheurs ne se soient pas tournés vers les archives judiciaires, où il est possible de dresser une liste exhaustive des crimes en consultant par exemple le plumitif ou les procès-verbaux des cours criminelles. Par contre, un tel travail demanderait la participation de bénévoles compétents afin de répertorier la totalité des homicides commis dans les différents districts judiciaires du Québec, et cela sur une échelle historique couvrant la période de la Nouvelle-France jusqu’à nos jours.

[2] Tout au long du présent ouvrage, le singulier et le masculin sont utilisés dans le seul but d’améliorer la fluidité du texte.

[3] Sylvie Grenier, « L’évolution des divers types d’homicides au Québec de 1954 à 1989 », Criminologie 26, no 2 (1993): 63‑83.

[4] La consultation de tous les dossiers judiciaires, dont certains font quelques milliers de pages, est une idée utopique pour un seul chercheur. De plus, étant donné que la justice canadienne n’a pas besoin de prouver un mobile pour condamner un accusé, la lecture de plusieurs dossiers ne nous apprendrait pas grand-chose sur la motivation des tueurs. Le fait de classifier et de regrouper certains types d’homicides nous aidera certainement davantage à améliorer notre vision des choses.

[5] Le lecteur qui serait tenté de reprocher au MCHQ d’être incomplet doit comprendre que la tâche est immense. À titre d’exemple, le centre de BAnQ-TR renferme plus de 2 km linéaires d’archives judiciaires. Au cours de l’automne 2018 et de l’hiver 2019, le projet J-DEX est parvenu à en indexer moins de 1%. Ces quelques mois de travail ont été répartis entre deux diplômés en techniques de la documentation du Cégep de Trois-Rivières, soit Eric Veillette et Sophie Chouinard.

[6] Stéphanie Toner, Code criminel (Toronto: Thomson Reuters, 2017).

[7] L’exemple type de ce genre de dossier pourrait se traduire par le suicide du sergent-détective Louis-Georges Dupont, retrouvé mort dans sa voiture de service en 1969 à Trois-Rivières. À partir des années 1980, sa famille a commencé à prétendre qu’il aurait été victime d’un meurtre en raison d’un témoignage accablant qu’il aurait rendu devant la Commission de police du Québec qui enquêtait sur l’administration de la police trifluvienne et sur le comportement de certains de ses policiers. Or, l’enquête du coroner de 1969, ainsi qu’une commission d’enquête publique entendue en 1996 et une autre enquête menée par la Sûreté du Québec vers 2010 ont toutes confirmé le verdict du suicide. À noter que le MCHQ se base sur des faits et non des documents produits par des auteurs (journalistes, écrivains, producteurs, etc.) ni sur l’opinion d’une certaine partie de la population pour classifier les homicides commis au Québec.

[8] Sur le site de BAnQ Numérique, plusieurs grands journaux du Québec sont publiquement accessibles. Depuis 2017, La Presse, Le Soleil, Le Nouvelliste et plusieurs autres sont même accessibles via la recherche intégrale de texte.

[9] Grenier, « L’évolution des divers types d’homicides au Québec de 1954 à 1989 ».

[10] Par ailleurs, nous considérons que des expressions comme « drame conjugal », « drame familiale » ou « drame passionnel » ne sont pas appropriés pour classifier des crimes impliquant la mort d’une ou plusieurs persones. Le mot drame en lui-même décrit davantage une gamme plus large d’événements et d’émotions.

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